À LÉON CLADEL
[Paris, 9 mai 1877.]
Mon cher Cladel,
J'ai commencé votre bouquin hier à 11 heures il était lu, ce matin à 9 !
Et d'abord il faut que Dentu soit fou, pr avoir peur de l'im le publier. Rien n'y est répréhensible soit comme politique, soit comme morale. Ce qu'il vous a dit est un prétexte ? Quant à Charpentier (auquel je remettrai vos feuilles vendredi – jour où je dîne chez lui) je vais lui chauffer le coco violemment, & en toute conscience, sans exagération & sans menterie, car je trouve votre livre, un vrai livre. C'est très bien fait, très soigné, très mâle. & je m'y connais mon bon.
J'ai deux ou trois petites critiques à vous faire (des niaiseries) – ou plutôt des avis à vous soumettre. Ainsi le mot « pécaïre » me paraît trop souvent répété. Qqfois, il y a des prétentions à l'archaïsme et à la naïveté. C'est l'excès du bien. – Mais encore une fois, soyez content & dormez sur vos deux oreilles – ou plutôt ne dormez pas – et faites souvent des œuvres pareilles. –
La fin est simplement sublime ! – & du plus gd effet.
Tout à vous
Gve Flaubert
Mercredi 11 h.
Si j'avais le temps, je vous en écrirais plus long.
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Je quitte Paris vers la fin de la semaine prochaine.